Je débute cette histoire un peu au hasard, un peu pour aider, un peu pour expliquer mon expérience de papa de jumeaux. C'est un texte que je poursuis de temps en temps. Une trace tangible des souvenirs fugaces que l'on a de ses enfants qui grandissent si vite :-).

Il est environ 3 heures du matin à l’hôpital de Sallanches. La péridurale marche bien, Sandrine a pu garder ses forces. L’accouchement peut commencer. L’équipe s’avance soit deux sages femmes, la gynécologue obstétricienne, la pédiatre, l’assistante maternelle et la sage femme de garde à la maternité qui est là et…moi. Les petits jésus peuvent arriver. Après, huit mois d’attente, de vigilance et d’engagement total pour voir arriver nos chèrs amours.

L’accouchement commence lorsque la sage femme perce la première poche des eaux. A cet instant je me dis qu’on ne peut plus revenir en arrière et que ma vie va basculer. Sandrine est formidable. La sage femme en formation fait bien son travail devant le vagin de ma moitié tandis que l’autre aide à maintenir la concentration et la détermination de Sandrine. Et …moi, je suis porteur d’eau. Premier « supporter ». C’est Hugo qui sort en premier. La sage femme me montre le dessus de son crane qui monte lorsque Sandrine pousse et qui redescend lorsqu’elle arrête son effort. Là une émotion m’envahit emprunte d’émerveillement. Je vois le crane de mon enfant. Un de ceux qui s’est développé dans le ventre de Sandrine, que l’on a fait germer l’espace d’un plaisir.

Elle se bat pour faire sortir son fils et ce combat m’émeut. Je me dis que j’ai de la chance d’être avec une femme comme elle. Hugo n’est pas en reste. Il se bat lui aussi avec ses 2,5Kg tout mouillé. Il finit par sortir. Il est tout de suite pris par la sage qui l’emmène dans une salle à coté pour le nettoyer, le peser, le tester, l’habiller. Et moi, je suis là, abasourdi comme pétrifié, je défaillis un peu puis me reprends. Une émotion comme je n’ai jamais eu. Un élan formidable de la vie vers elle même. Je vais dans la salle où se trouve mon fils et je vois un petit bout pas gras du tout, désorienté, perdu, qui demande ce qui lui arrive. J’entends Sandrine me questionner : « alors, quel poids fait-il ? Va-t-il bien ? ». Je la rassure, lui dit qu’il va bien. Je bascule dans la salle d’accouchement, et je vois la sage femme appuyer comme une malade sur le ventre déformé de Sandrine. Cela m’impressionne. « Il faut que le second reste placé pour qu’il sorte correctement » me dit elle. Je me replace et je n’ai même pas le temps de jouer mon rôle de porteur d’eau que Margot est déjà sortie. C’était trop rapide pour moi. Je vois la tête de ma fille sortir. La sage femme lui tord le cou, la première épaule puis la seconde et voilà ma fille sortie de l’antre chaude et bienfaitrice. La sage femme me demande si je veux couper le cordon. Je m’exécute et vois ma fille basculer dans les bras de maman quelques instants puis suivre le même chemin que son frère.

La délivrance passée, Sandrine est fatigué mais heureuse. Fier d’avoir réussi à sortir les deux drôles. Et je suis fier d’elle. Bon, avec un bon chocolat chaud et quelques gâteaux tandis qu’elle ne peut rien avaler à cause de la péridurale. Et moi, je suis content, pas encore conscient de l’énormité de la chose et que je suis tout simplement père des deux plus beaux bébés du monde !